Cette publication fait partie d'une série d'articles. Prenez le temps de la lire dans son intégralité si vous vous lancez dans des travaux similaires, cela vous évitera des déconvenues ;-)
Premier ponçage
Je commence par un raclage superficiel, histoire de prendre en main mon nouveau racleur tout neuf.
Vidage du safran
J’utilise la scie sabre pour pratiquer une ouverture sur l’arête du safran.
Rapidement, des gouttes de liquide s’écoulent par l’ouverture.
Je poursuis. A ce stade, j’ai pratiqué une ouverture de l’ordre de 40 cm de long sur l’arête de safran.
En inclinant le safran, l’eau s’écoule progressivement. Au final, près de 5l sont évacués, impressionnant !
Ouverture du safran
Je poursuis la découpe en faisant tout le tour du safran. La bonne nouvelle c’est que j’arrive à avoir une découpe assez propre et rectiligne. La moins bonne c’est que bien que l’ouverture fasse tout le tour complet du safran et malgré l’insertion d’éléments, difficile d’ecarter les deux joues et d’ouvrir le safran en deux.
Je prends soin de decouper également la partie intérieure en evitant la structure metallique puis j’introduis des éléments écarteurs de plus en plus gros en frappant dessus à l’aide d’un marteau et enfin victoire !
Je suis assez surpris par ce que je découvre. J’ai l’impression de contempler des tranches de jambon géantes ou des poumons mis à nu. C’est tres différent de l’aspect intérieur du safran de Marinou.
J’ignore d’où peut venir la couleur rouge bordeaux. Ce qui est plus évident, c’est que le safran a déjà été ouvert et que quelqu’un a entrepris de renforcer sa structure interne en imprégnant une grande quantité de tissu avec de la résine. La structure métallique disparaît littéralement sous l’epaisse couche. L’arête inférieure est tordue et seule la supérieure n’est pas recouverte. Malgré son aspect souple, le materiau qui recouvre est très dur au toucher. L’ensemble est costaud, aucun doute là dessus.
Je suis perplexe sur la suite à entreprendre. Initialement je pensais dégager la strucure métallique, poncer le tout et refaire une stratification propre mais il est clair que la tâche sera ardue et que les outils dont je dispose ne me permettront pas de la mener à bien. La ponceuse n’attaque pas du tout le revêtement, il faudrait une meuleuse mais Ghismo d’Edelvoilier avait fait un dossier dessus et il déconseille son emploi quand on ne maitrise pas parfaitement l’enfin qui mal utilisé peut provoquer une catastrophe.
Et puis est ce bien nécessaire de tout refaire ? Malgré la methode peu orthodoxe employée, la structure me semble saine et ne montre pas de signe de faiblesse suite au contact prolongé avec l’eau qui s’était introduite.
Je finis par décider de laisser le tout tel quel et de recoller le safran. Une partie de moi répète “tout ça pour ça” mais l’autre lui répond gentiment que le fait d’ouvrir le safran a permis d’evacuer l’eau, de bien sécher l’intérieur et de s’assurer de l’état et de la solidité de la structure, pas si mal comme résultat !
Plat de résistance : la choucroute
Quatre mois se sont écoulés depuis l’ouverture du safran quand je suis enfin prêt au niveau matériel (et psychologique !) à me lancer dans la phase délicate du recollage.
Il me faut pour cela manipuler des produits toxiques pour lesquels ma seule expérience se limite à la lecture de tutoriels et de vidéos.
Ce que l’on nomme communément “choucroute” est en fait de la colle polyester armée.
C’est une colle très puissante qui contient de la fibre de verre (c’est en cela qu’elle est “armée”) qui lui confère sa résistance. Elle est accompagnée d’un catalyseur, un liquide qu’il faut mélanger selon un dosage précis qui varie en fonction de la température (1 à 3% en général). Une fois les deux produits mélangés, la réaction chimique se déclenche et on dispose d’un temps limité pour l’appliquer (20 minutes grosso modo). Ce temps dépend du dosage du catalyseur et de la température : plus il fait chaud, moins on a de temps. Pour cette raison, il vaut mieux n’utiliser qu’une petite partie du produit pour le mélange avec le catalyseur, et renouveler l’operation autant de fois que nécessaire.
La colle armée est un produit dangereux comme le rappelle l’étiquette.
Danger pour sensibilisation cutanée, inhalation, corrosion ou irritation des yeux.
Danger matières inflammables
Risque d’effets graves pour les organes.
Il faut donc être prudent et porter les équipements de protection suivants.
Je m’équipe conformément aux recommandations. Le masque 3M est excellent, les lunettes également mais avec l’effort, elles se couvrent de buée et il faut que je les retire par moments et que je les essuie pour pouvoir continuer d’y voir.
Une chose importante : la colle armée de polyester degage une odeur très forte qu’on peut facilement sentir à 10m à la ronde ; même en travaillant dehors, je me rendrai compte un peu tardivement qu’il aurait fallu fermer portes et fenêtres de la maison. A noter qu’avec le masque 3M, on ne sent rien, ce n’est que quand on le retire qu’on réalise l’intensité des effluves du produit.
Je commence par racler de manière appliquée les deux moitiés de safran. Cela demande pas mal d’effort mais le racleur fait des merveilles.
Je ponce ensuite à l’aide la ponceuse orbitale en commencant par du grain grossier (80) puis progressivement jusqu’au 240.
Une fois le safran bien lisse, je le nettoie à l’acétone.
Ensuite, j’utilise la rape à bois pour poncer grossièrement les parties qui vont être collées. L’idée est d’ameliorer l’adhérence de la colle. Je termine par un nettoyage des surfaces concernées à l’acetone puis je laisse secher quelques minutes.
Il est temps de passer au mélange.
Avant tout, je prepare soigneusement mon espace de travail pour avoir tout sous la main car une fois le mélange effectué, le temps est compté. J’ai de l’essuie-tout pour essuyer les bavures, une poubelle, des gants de protection de rechange, des contenants en plastique, des spatules en bois…
A l’aide d’une balance, je pèse 200g de choucroute. La temperature est de 27°C. J’ajoute 2% de catalyseur soit 4g.
Je mélange ensuite soigneusement à la spatule puis j’applique toujours à la spatule sur le safran.
Et voici le résultat sur une des moitiés.
On voit que la choucroute a changé de couleur. Sur le coup ça me semble bien mais en revoyant cette photo, il est évident que j’aurais dû mettre plus de produit…
Je refais du mélange et je répète l’opération sur l’autre moitié de safran puis je presse les deux moitiés l’une contre l’autre et je les maintiens ainsi à l’aide de tous les serre-joints dont je dispose.
Toute cette operation s’effectue en une demi-heure grosso modo en mode stress intense et je n’ai clairement pas le temps de prendre des photos.
J’ai des doutes sur la capacité des serre-joints à exercer une pression suffisante (d’autant que la surface tout en courbe du safran ne facilite pas leur pose). Si c’était a refaire, j’utiliserais la fonction étau de mon établi pour le maintien principal et les serre-joints viendraient simplement en renfort.
Je m’aperçois d’entrée que je n’ai pas mis assez de choucroute sur certaines parties du safran. Bouhouhou, je ne suis pas ecore tiré d’affaire.
Quelques semaines après, je réattaque. Je commence par poncer à la râpe à bois les bords du safran pour enlever les excédents de choucroute.
Puis inspection de détail.
Et c’est reparti pour une seconde application de choucroute sur tour le pourtour. Cettz fois j’au retenu la leçon et j’en mets autant que possible en faisant bien baver le produit.
Après séchage, nouveau raclage pour enlever l’excédent de matière suivi d’un ponçage.
Cette fois le résultat est à la hauteur de mes attentes. Les arêtes sont lisses et il n’y a plus de zones manquant de matière.
Stratification
Après avoir passé l’épreuve de la choucroute, j’aborde en confiance celle de la stratification. Celle-ci vise à renforcer l’extérieur du safran par l’appostion successive de couches de fibre de verre imprégnée de résine.
J’ai longtemps hésité entre la résine polyester et la résine Epoxy. La première a pour elle d’être plus économique mais elle n’est pas étanche. L’Epoxy est étanche et plus résistante ; en contrepartie, elle est plus chère et décrite comme plus délicate à manipuler. Bien que la résine Epoxy semble plus indiquée pour un safran qui est constamment immergé, j’ai quand même choisi la résine polyester, tout simplement pour coller – sans jeu de mots 😉 – à la technique du tutoriel de Marinou.
Je ne décrirai pas ici le détail de la stratification que j’ai réalisée tout simplement parce qu’elle va se révéler être un monumental échec !
La stratification des deux premiers côtés du safran m’a semblé de bonne facture, mais je me suis totalement loupé sur la suite.
Ça a été une cata de chez cata.
Le billet de blog “Stratification du safran : chroniques d’un échec” détaille l’opération. Le lecteur peut ainsi se rendre compte de ce à quoi peut ressembler un dérapage non contrôlé. Allez, un rapide aperçu.
J’ai dû enlever toutes les couches de résine pour remettre le safran dans son état précédent ; j’ai poncé autant que j’ai pu pour retrouver des sufaces les plus lisses possibles.
Le temps n’était plus aux atermoiements : nous étions en septembre, la saison de voile était presque terminée et depuis son achat mon brave Kribi n’avait toujours pas quitté sa remorque.
Me relancer dans une stratification aurait signifié renoncer à naviguer cette année, ce à quoi je ne pouvais me résoudre.
De plus, le safran me donnait l’impression d’être parfaitement solide avec la choucroute. J’ai donc décidé de passer directement au gel coat et de faire l’impasse sur le renforcement extérieur.
Application du gel coat
Le gel coat est une résine synthétique qui sert à protéger, étanchéifier et embellir les matériaux composites. Elle se présente comme de la peinture très épaisse.
Là encore, nettoyage préalable à l’acétone.
Puis je dose la quantité de réactif.
Je mélange ensuite soigneusement à la spatule.
Et j’applique au pinceau.
J’essaye de travailler vite tout en restant soigneux.
Bis repetita sur l’autre face.
Pour une raison indéterminée (peut être un mauvais dosage du réactif, une humidité trop élevée ou une quantité excessive de produit) le séchage va prendre beaucoup de temps. Certaines zones sont sèches au toucher au bout de quelques heures, d’autres ne le seront qu’une semaine après.
Résultat final
L’aspect final est plus que correct, même si un examen rapproché révèle des défauts. Par endroits, il y a trop de gel coat, à d’autres pas assez et quelques imperfections.
Malgré tout je pense que le safran est étanche et solide, ce qui est était le but recherché.
Remontage du safran
Il ne reste plus qu’à remettre le safran à poste.
C’est reparti pour les coups de pelle, c’est plus difficile que la dernière fois et je dois elargir le trou à plusieurs reprises.
Mais une fois cela effectué, le reste est un jeu d’enfants , il me suffit de rejouer la séquence de dépose du safran dans l’autre sens.
C’est la fin d’un chantier plein de rebondissements et riches d’enseignements.